prunes

Lorsque j’ai descendu l’escalier, ce matin, bien avant d’avoir mis le pied sur le carrelage de la cuisine, j’ai été assailli par le suave parfum des fruits et ça m’a rempli d’aise. Pourtant il était six heures, et il faisait sombre, et tous mes neurones n’étaient pas encore connectés.

C’est qu’hier soir, Elle était revenue de chez ses parents avec le coffre plein de victuailles. Il m’avait semblé mettre un temps fou à décharger tous ça, une douzaine de courgettes de couleurs diverses, et plus ou moins monstrueuses, des concombres un peu tordus, de ceux qu’on trouve dans les jardins, un carton d’oignons et d’échalotes, un sac de patates. Il y avait encore un énorme cageot de tomates, bien lourd, et je sais d’avance qu’on en balancera la plupart, à moins qu’on les donne, encore que les voisins sont en vacances, alors on aura du mal. Si j’ai du courage je ferai du coulis. Et surtout, il y avait des prunes. Plus exactement un cageot de mirabelles et un autre de reines-claudes.

Nous avions dîné, puis, au dessert, Elle avait posé sur la table une jatte remplie de prunes vertes, les mirabelles étant destinées à faire de la confiture. Je me souviens qu’elle nous a mis en garde, les reines-claudes ne sont pas trop mûres, a-t-elle dit. Tu parles. Certaines peut-être. Mais bien avant de nous mettre à table, tandis que je préparais le repas, j’avais pioché sans retenue dans le carton ad hoc, et j’en avais trouvé suffisamment, qui étaient dorées par le soleil d’août, un peu fendues, et juteuses à souhait. Comment décrire un goût, un parfum, c’est impossible, n’est-ce pas, où alors avec les termes pompeux qu’on prête volontiers aux œnologues. Mais les chanceux qui ont eu l’occasion de cueillir les fruits sur l’arbre et de s’en gaver aussitôt comprendront mon plaisir.

Les enfants, quant à eux, furent plus volontiers tentés par les mirabelles. Ils reçurent donc l’autorisation d’y goûter, et il suffisait d’observer le pétillement dans leurs yeux pour deviner leur joie.

Lorsqu’ils furent couchés, harassés par une riche journée au grand air, nous nous attaquâmes à la séance confiture. J’ai choisi une recette dans un livre : mirabelles à l’orange et à la cardamome. Pendant qu’Elle se lançait dans le dénoyautage des fruits, j’ai émincé très finement deux oranges, que j’ai mises dans la gamelle avec une partie du sucre et un peu d’eau. Je les ai fait pocher jusqu’à ce qu’elles deviennent translucides. Après cela j’ai aidé à finir de couper les mirabelles. Voir ces petits fruits odorants, leur couleur jaune vif agrémentée de larges taches rouges était un ravissement. La tentation restait grande, et il y avait encore des fruits en réserve dans le cageot… Ceux que nous avons coupés ont rejoint les oranges dans la bassine, avec le restant du sucre, un jus de citron et les graines de cardamome. J’ai porté le tout à frémissement, et arrêté l’induction afin de laisser reposer pour la nuit, et même plus, la suite de l’opération est pour ce soir.

J’ai un peu mal au ventre, aujourd’hui, je me demande bien pourquoi.

Comments

[Syl]

Je partage un peu le mal au ventre, car la cagette de mirabelles est passé en confiture : une passée au gingembre, l'autre à la framboise / coriandre et la 3eme...à la confiture de ventre.....

[phil]

Michèle : non Elle n'est pas loraine, mais poitevine ( bien que née dans le Loiret : clin d'oeil à Véronique).
:-)

[euqinorev]

Miammmm !
J'ai goûté les deux très récemment, les reines-claudes et les mirabelles du jardin de ma marraine, dans le Loiret. Et ce que je me suis régalée, toutes en effet si juteuses et si sucrées...

[michèle]

serait Lorraine???????

[phil]

Je vois que ces prunes réveillent vos souvenirs. Ca me réjouit.
:-)