Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
le carnet vert
11 juin 2015

balbutiement

Quand j’étais jeune, avant de rencontrer Elle, je n’écoutais jamais de chansons françaises. Les seules exceptions étaient quelques titres de Brassens, que nous avions étudiés en cours de français, au lycée ; et deux ou trois rengaines de Joe Dassin, que je fredonnais parfois, depuis que nous l’avions vu en concert à Chamborigaud, en nous haussant par-dessus une haie alors que j’étais adolescent. Je ne pouvais donc pas deviner qu’un chanteur en particulier deviendrait un jour une sorte de pilier de mon refuge personnel.

J’ai en moi cette image : je vis dans une sorte de maison sur pilotis, ouverte sur le ciel, et soutenue par les solides colonnes que sont les personnes qui comptent pour moi. Chaque fois que l’une d’elle disparait, c’est comme si on sciait un des pilotis, fragilisant ainsi ma maison. Nous avons parlé de ça avec ma cousine, l’autre soir, en attendant que commence notre cours de yoga. Elle parlait de brèche ouverte dans son rempart. J’ai évoqué mes pilotis.

Nous avons la chance d’être encore entourés d’anciens. Mais c’est une évidence d’affirmer qu’ils ne sont pas éternels. Dès que l’un d’eux s’efface, on se trouve exposé un peu plus. Un jour nous serons en première ligne.

Parfois me vient en tête la mélodie dont je me suis fait un hymne, renforçant ainsi mon refuge ouvert sur le ciel. Elle aimait le chanteur, Elle écoutait ses disques très souvent. Elle m’a convaincu de l’aimer aussi. Nous l’avons choisi pour la cérémonie à l’église, cela fait bien longtemps, je ne compte même plus les années. Un mécréant dans une église : nous pensions que c’était une bonne idée. Comme je suis incapable de mémoriser une chanson ou une poésie, j’ai cherché les paroles de celle-ci sur internet, et je les ai imprimées. Je les garde dans la jaquette de mon agenda, avec divers papiers dont j’ai l’usage. Parfois je les lis. L’air retentit silencieusement en moi. Alors je souris. Je me sens fort. Je pense à Elle. Que serais-je sans toi ? Je le murmure intérieurement, et j’espère follement qu’elle l’entend à l’instant même, affairée qu’elle est à l’autre bout de la ville. Et qu’elle sourit aussi. Qu’elle pense à moi. Et qu’ensemble nous nous amusons au souvenir de nos oncles, ou nos cousins, je ne sais plus, tirant ensemble sur la corde du clocher afin de faire sonner les cloches à la volée et crier ainsi au monde notre joie d’être unis.

Publicité
Publicité
Commentaires
C
"Quand j’étais jeune, avant de rencontrer Elle" : tu veux dire que, quand tu as rencontré Elle, tu as cessé d'être jeune" ? Étrange !
Répondre
le carnet vert
Publicité
Archives
Newsletter
14 abonnés
Visiteurs
Depuis la création 145 951
Publicité