à l'épervier
Nous filions à travers le vieux pays ; la terre était mate, le ciel roulait bas. Inutile même de parler des hirondelles et de leur façon de voler. Parfois, au loin, nous distinguions une forme claire se mouvant à ras de champ. Quel oiseau est-ce, demandais-tu ? Je ne savais pas. Je ne reconnais que les geais. Celui là n’en était pas un. Je le vis s’élancer, puis planer un instant au-dessus de la vague céréalière. J’ai pensé à un rapace. Malgré ça, je t’ai dit : une mouette. De toute manière les oiseaux sont un peu rapaces aussi.
L’oiseau n’était ni un geai, ni une mouette. C’était un petit rapace. Un faucon ? En vérité je ne sais pas à quoi ressemble un faucon. J’ignore même s’il en existe au plumage clair. Et puis j’ai pensé à l’épervier.
En l’occurrence l’épervier n’était pas un oiseau, il était une idée. Alors même que, sur la route étroite et droite, venait face à nous un fourgon roulant à gauche, je me suis mis à craindre inutilement pour ma peau, puis à penser à des jeux d’enfants. Je me suis demandé incongrument quand je pourrais retourner dans la cour de récréation pour prendre part à cette longue rangée de mômes se tenant par la main et tentant d’emprisonner les derniers oisillons libres à chaque fois qu’on criait le signal : à l’épervier, sortez ! Il me semble que la dernière partie était restée inachevée.