apéritif
Il y avait cette douceur qui planait sur le jardin.
Le soir.
C’était en juin.
Quelques rayons de soleil perçaient à travers les branches du gros noyer.
Dans le cerisier les fruits rougissaient. Étaient-ils timides ? Des oiseaux invisibles s’ébattaient dans le feuillage. Parfois on voyait s’envoler un merle avec du rouge au coin du bec.
J’ai disposé deux chaises devant la petite table en teck. Nous nous ferions face.
J’ai dit que l’apéritif.
J’ai dit que je l’avais bien mérité. Tu n’as pas protesté. Pourtant c’était jeudi.
Dans un bol j’ai mis les olives. Des noires au parfum de garrigue.
Dans ton verre, un peu de vodka avec du jus d’orange.
Dans le mien, du pur malt.
Nous avons dit les projets, et c’était bon.
En bas, un train est entré dans le tunnel en faisant retentir son signal. C’était le seul bruit susceptible de troubler notre paix.
Et encore.
Un train. Un tunnel.
J’y voyais mes rêves d’enfant.
J’aurais voulu que le temps s’étire. Que nous restions là longtemps, à siroter de l’alcool, à m’amuser de la légère griserie que je sentais poindre, et quelle importance puisque nous n’avions pas prévu de conduire.