météo pluvieuse
Sur le pont des arts, nul vent fripon ne soulevait les jupes ce soir-là. Même pas par hasard.
Il faisait déjà nuit.
Des passants erratiques erraient.
Des couples insouciants s’embrassaient et se tiraient le portrait mutuellement devant les lumières immuables de la ville. Une chance inouïe ferait peut-être qu’un jour des albums photos s’enorgueilliraient de clichés typiques et remarquables, à Tokyo, à Pekin, à Sydney ou dans d’autres ailleurs. Ce qui reste peu probable. Personne en effet ne prenait la précaution élémentaire, à défaut d’un pied, de s’appuyer sur la rambarde de bois. Le résultat serait donc flou ou, pour ceux qui usaient d’un flash, ne serait qu’un portrait pouvant avoir été saisi n’importe où.
Sous mes pas je voyais le fleuve scintiller à travers les planches de la passerelle. Un léger vertige s’emparait de moi. Une vague impression d’avoir la tête en bas, de contempler des constellations mouvantes.
La douceur exceptionnelle de cette soirée d’automne incitait à la flânerie.
J’ai pris appui sur la rambarde.
La grande carcasse illuminée de la toureffelle avait perdu la tête dans une écharpe de nuages. Cela n’alertait personne. Les couples continuaient de s’embrasser insouciamment, les passants d’errer passablement. Et moi je savais bien qu’il allait pleuvoir incessamment.