Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
le carnet vert
26 mai 2006

fourmilière

En d’autres temps, j’aurais renâclé, j’aurais freiné des quatre fers, Elle ne m’y aurait pas entraîné si facilement.

Mais les temps changent, et les gens aussi.

Avec les ans on devient plus sage, plus patient.

Parce qu’autant vous le dire, j’avais des doutes. Je dirais même que ça commençait très fort. Nous avions pourtant pris la précaution de partir au plus tôt. N’empêche. Lorsque nous avons pris le métro de la ligne 6 à Denfert-Rochereau, il me semblait qu’il y avait bien du monde. Pour un dimanche matin c’était suspect. Quand nous avons changé de ligne, à Pasteur, il y en a plein qui ont fait comme nous. Là je n’avais plus guère de doutes. Et de fait ils sont tous descendus à la porte de Versailles, ces ballots. Nous n’étions pas les seuls à visiter la foire de Paris.

Vous dirai-je tout ce que nous avons vu ? Non bien sûr.

Allez, un ou deux temps forts suffiront bien. Trois ? Bon, si vous y tenez…

Déjà, il faut imaginer l’endroit, pour bien saisir le challenge : un ensemble de huit bâtiments grands comme des aéroports (huit, vraiment ? je crois bien, oui), certains sur plusieurs niveaux, avec des passerelles couvertes pour les relier.

Dans un des bâtiments nous avons déniché le stand Habitus. Quand on veut voir un exposant en particulier, mieux vaut avoir mémorisé le numéro de son stand, au moins ça permet de jouer des coudes dans la bonne direction. J’avais enregistré C17 dans ma petite cervelle, c’était C14. Ou l’inverse. Bref, on a trouvé. Habitus, c’est la marque d’une créatrice de vêtements qui tient boutique à Aigues-Mortes et qui nous tient informés des expositions auxquelles elle participe. Je raconterai peut-être une autre fois nos passages dans cette boutique, c’était du plaisir. Oui, vous avez bien lu : un homme peut prendre plaisir à accompagner son épouse dans un magasin de fringues, et voir s’écouler le temps au fil des essayages. Je vous rassure, ça ne marche pas partout. Mais là, oui. Et figurez-vous que dans la foule de la foire également, sur ce stand C14, j’ai passé un moment agréable (pour moi, pas pour mon chéquier). J’étais heureux de la voir sortir de cette cabine, drapée dans des étoffes qui semblaient avoir été conçues pour elle. J’avais envie de tout acheter. Je me suis dit que parfois on peut envier ceux qui peuvent dépenser sans compter. Moi, j’ai compté un peu, et dépensé aussi. Pendant qu’Elle essayait, je discutais avec la créatrice des vêtements. A un moment je me suis assis sur une banquette recouverte de velours jaune. Ainsi dissimulé derrière une rangée de manteaux, j’étais bien placé pour capter les réflexions des gens qui passaient, et c’était rigolo.

Plus tard nous entrions dans un autre hall (c’est comme ça que sont appelés les différents bâtiments, comme dans un aéroport, je vous dis). A l’extérieur une profusion d’affiches déclarait à l’envi sur fond vert pomme que le hall en question était le royaume de « pour vous, mesdames ». Qu’à cela ne tienne, me dis-je, je continuerai à jouer les entomologistes. Observons donc le monde s’agiter. Le hasard a voulu qu’on entre par l’allée médiane du lieu, elle-même pourvue d’un no man’s land en son centre, une sorte de salle des pas perdus, dans un aéroport, ça peut servir. Et de fait nous y croisâmes coup sur coup deux malotrus de sexe masculins, qui semblaient en effet perdus, rouges de colère, et qui éructaient des insanités dans des téléphones portables. Nous avons entendu clairement l’un d’eux brailler qu’il ne bougerait pas de là, c’est toi qui vas venir, espèce de conne, oui il a dit ça, en français ça signifie rogntudjuuûû de krwx@zyj§, et je me suis dit que si j’étais elle ce serait là un cas de divorce, mais je n’étais pas elle et question étude d’insectes singuliers voila que j’étais servi. Bon, de fait, comme prévu nous étions dans le domaine de pour vous mesdames, produits de beauté, manucure, ersatz de parfums, verroterie et colifichets divers, auxquels s’ajoutaient nombre de stands dévolus au bien être par les vertus là des huiles essentielles, ici des fauteuils massants. (oui je m’arroge le droit d’inventer des mots). Ces machins-là, ça m’a fait penser à Marathon man, vous savez ce film où Dustin Hofmann est poursuivi par un ancien nazi qui torture ses victimes avec des roulettes de dentiste. J’en frémis encore. Tout à fait la bobine d’un fauteuil de dentiste, ce truc. Le pire c’est que les gens qui les essayaient, dont j’ai refusé de faire partie, se voyaient secoués dans tous les sens, tu parles d’un massage, ça me fait penser que j’ai une note à rédiger, un de ces jours, sur les effets des pavés de Turckheim sur le cerveau des bébés, vous comprendrez le moment venu. En tous cas nous avons eu du mal à croire aux effets relaxants de la chose. Le nec plus ultra, au royaume de pour vous mesdames, c’est les stands d’épilation. Une prolifération. Je suis toujours un peu étonné par cette frénésie épilatoire. Comme de juste Elle et fille n°3 ont jeté leur dévolu sur un des stands en question, qui vendait à prix d’or d’ami des morceaux de papier de verre particulièrement efficaces, parait-il. Tu m’étonnes. Avec une pommade apaisante, autrement ça vaut pas. Les lots s’arrachaient comme des petits pains. La démonstratrice a attendu qu’un petit nombre de femmes soit rassemblé autour d’elles pour faire son numéro. Première étape, elle a fait asseoir une des patientes sur un tabouret, lui a fait remonter une jambe de son jean, et a entrepris de lui raboter le mollet, après quoi elle a invité les autres candidates à venir caresser ledit mollet. Deuxième étape, elle a montré a qui voulait les voir différentes parties non intimes de sa propre anatomie, qui étaient effectivement aussi lisses que le crâne de Daniel Boulanger, tout en proférant autour d’elle qu’elle était normalement une brune plutôt pileuse, qu’elle avait passé son papier de verre il y a un temps certain et que ça n’avait pas encore repoussé. Je commençais à me désintéresser complètement du sujet et à rêvasser à ce que je pourrais bien vous raconter, lorsque, troisième étape il lui prit l’idée saugrenue de m’utiliser comme cobaye et de me passer sa toile émeri sur le bras. Dans un coin qui ne se voit pas, qu’elle a dit. En l’occurrence sur la face interne du poignet. Je te demande un peu. Les patientes ont jeté un œil mi-égrillard mi-admiratif sur le résultat. Aucune ne m’a caressé le poignet, je me demande bien pourquoi. Pourtant ça râpe, ce truc. Puis chacune s’est jetée frénétiquement sur son chéquier. Ça s’arrachait comme des petits pains, je vous dis.

Troisième temps fort, comme promis, mais je serai bref. Nous avions atteint sans doute le moment le plus chaud de la journée. Un de nous a eu l’idée de pénétrer dans un hall où une foule compacte et bigarrée se pressait autour de stands antillais dont la plupart proposaient une abondance de rhums et de punchs. Moi perso ça m’a mis l’eau à la bouche, si je puis dire, et j’ai pensé que pour l’apéro du soir, hein… Nous avons donc fait halte à un stand au hasard. On nous a fait goûter diverses préparations, et notre choix s’est porté sur un punch au fruit de la passion. Je n’irai pas jusqu’à dire que c’était une boisson d’homme, comme dans les tontons flingueurs, mais ça déménageait quand même. Je peux vous dire que c’était de l’artisanal, rien à voir avec les choses colorées et édulcorées qu’on trouve dans les supermarchés.

Après ça la journée commençait à me peser sur les endosses, comme on dit dans les polars, il était temps de rentrer, et puis à la fin, toute cette foule qui errait en tous sens, désordonnée, ça me donnait le vertige, on se serait cru dans une fourmilière quand on a filé un coup de pied dedans et que les bestioles affolées se cognent et se grimpent dessus et s’égaillent dans toutes les directions.

Publicité
Publicité
Commentaires
D
Mon neveu habite juste en face, enfin deux rues en retrait et c'est bien vrai que cela ressemble à des cubes d'aéroport et qu'est-ce qu'il peste après toutes ces fourmis certains jours ;)
Répondre
S
Ah; ça j'en chie....y'a pas d'autres mots !
Répondre
P
Baïlili : oui il faut de la patience, mais je suis zen. Enfin je l'étais à peu près ce jour-là.<br /> Syl, Choubine : et ben y a pas de photo, il faut vous contenter d'imaginer.<br /> Et Syl, je sais je vais pas de faire rire mais y a que l'huile de coude, pour le papier peint. Nous avons fait ça il y a trois ans dans notre appart parisien, je te jure qu'ils les collaient bien les papiers, dans le temps. On en a chié. Je te souhaite donc bon courage.<br /> :-)
Répondre
C
Hum... je crois que fille numéro 3 nous a déjà un peu raconté la scène de l'épilation. Il manque une photo, c'est sûr.
Répondre
S
Oui dommage que tu sois le gardien de l'APN...ça manque de photo pour le test dépilatoire ! mdr<br /> <br /> Sinon, dans ta foire, y'avait pas un truc qui permette de décoller 4 épaisseurs de tapisserie en 2 coups de cuillère à pot ! <br /> Si oui, j'achète de suite !
Répondre
le carnet vert
Publicité
Archives
Newsletter
14 abonnés
Visiteurs
Depuis la création 145 959
Publicité