la dernière fois
La dernière fois que je t’ai vue,
J’ai dû avoir un mouvement de recul, je ne sais pas, et si c’est le cas, ce fut bien sur involontaire, ce qui ne m’empêche pas d’en éprouver un peu de honte.
Assise sur ton lit de douleur, tu m’as demandé si je te reconnaissais.
Ce sont tes mots.
Et bien entendu que je te reconnaissais. Comment pourrait-il en être autrement. Nous nous étions rencontrés seulement quelques mois plus tôt, en été.
Mais il est vrai aussi que tu avais changé. La maladie t’avait changée.
Tu étais, comment dire, une vieille femme.
Tu étais la souffrance.
Tu étais la fatigue.
Dans ton regard : aucune résignation. Tu ne voulais pas. Il te restait encore tellement de rires et d’amour à donner, tellement de toiles à couvrir de couleurs.
Tellement à faire.
Est-ce que ça a un sens, de partir à quarante-trois ans ?