le col d'aubisque
Sur mon bureau, à gauche de l’écran, un support en plastique transparent montre une photo de ma petite-fille. Souriante. Quel âge a-t-elle sur la photo, je n’en sais rien. Ce n’est pas une vieille photo. Maintenant elle a quatorze ans. L’âge que j’avais lorsque je suis parti pour la première fois en camp d’ados. J’étais un des plus jeunes. Je crois que je m’y trouvais bien. J’ai en tête de belles images. Floues, bien sûr, à cause de la distance, mais riantes.
Nous étions dans les Pyrénées. Je me souviens du soleil. Je me souviens du vert cru des prairies et des fougères. Je me souviens des San-Antonio que nous lisions en cachette, sous la houlette d’un comparse lyonnais. Je me souviens de mes premières soirées dansantes. Je me souviens d’ « Instant Karma ». Je me souviens de « Hair »et de Juju.
Je me souviens du Tour de France. Un jour nous sommes montés au col d’Aubisque. Nous avons communié dans la liesse populaire. Est-ce une illusion ? Il me semble me rappeler de chevaux sauvages gambadant dans les fougères. Eddy Merckx a passé le col. Je crois que nous avons attendu longtemps avant de voir apparaître un petit groupe de poursuivants, parmi lesquels Raymond Poulidor. Personnellement, ce jour-là, je n’ai rien fait, si ce n’est applaudir les champions. Et pourtant il me semble qu’il s’agit là d’un jour majeur de mon existence. Je ne saurais en expliquer la raison. Mais on m’accordera volontiers une certaine émotion lorsque, il y a peu, à l’occasion d’un salon du livre, j’eus l’occasion de trinquer et d’échanger quelques phrases avec mon taiseux héraut d’autrefois.