j'ai osé
J’ai osé. J’ai regardé un truc à la télé et j’ai bien ri, parce que je suis bon public. Nous étions lovés dans le canapé bleu, et Elle s’est endormie dans mes bras. Je suis bien certain qu’elle n’a rien vu du film. Ça ne l’a pas empêchée, quand ça été fini, de s’exclamer qu’elle ne voyait pas l’intérêt de ce genre de spectacle. Personnellement, une histoire absurde et des images kitschissimes, ça me convenait parfaitement. Je retombais en enfance, quasiment, enfin disons en adolescence.
J’ai osé. J’ai regardé « Faut pas prendre les enfants du bon dieu pour des canards sauvages ». Vous vous rendez compte ? Quant à Elle, elle m’a regardé avec un air affligé, après. Je sais qu’elle a du mal, avec ce genre de niaiseries. Moi, à petites doses, j’aime assez. Je ris. Parce qu’il faut bien avouer que cette histoire est complètement crétine. Mais Bernard Blier, André Pousse, Marlène Jobert. Et encore Françoise Rosay en mémé flingueuse. Et Paul Frankeur. Et Robert Dalban. Un casting de régal. Un régal de casting. J’ai ri, je vous dis.
J’ai osé. Il n’y avait tellement rien sur les chaînes de télé dites conventionnelles, que j’ai consulté les pages suivantes dans le programme. Et je suis tombé là-dessus. J’ai appuyé sur le numéro 8 de la télécommande, et hop. C’est assez inhabituel, hein. Je ne sais pas si vous, mais moi ça me casse saintement les pieds de supporter des interruptions publicitaires et intempestives. Même si le scénario du film est si mince qu’on peut voir à travers. Alors pour ça, la 8, le moins souvent possible. Je suis allergique à la pub. Heureusement que je suis loin d’être un accro de la télé. En plus, ces couillons là, ils nous ont zappé le générique de fin. Seigneur ! Pardonnez leur, ils ne savent pas ce qu’ils font.
J’ai osé. C’était surtout parce que ça me rappelait des souvenirs. Une fête de famille, il me semble. Un réveillon du jour de l’an, je dirais. Chez mes parents, nous avions une vénérable télé en noir et blanc. J’imagine que ma sœur et moi avions été les seuls à nous délecter de ce monument cinématographique qu’était « Faut pas prendre les enfants du bon dieu pour des canards sauvages ». J’imagine que ma mère avait dû se réfugier promptement dans la cuisine, et que mon père et mon oncle avaient continué de s’asséner des vérités politiques digne du café du commerce. J’imagine que finalement, ma sœur non plus… Bref. Mais bon sang, qu’est ce que j’avais ri.