sur la côte sauvage
Des oiseaux invisibles donnent de la voix, des trilles légers qui dansent dans le vent comme autant de ballons lâchés. Mon réflexe est d’ouvrir les yeux et de sonder le ciel. C’est facile, je suis allongé sur du sable sec, parmi les oyats. On pourrait se croire en juillet, au milieu d’un champ de blé. On s’efforcerait en vain à débusquer les alouettes. Or le grondement lointain et continu nous rappelle la présence de l’océan, là, au bout de la plage, si près et si loin de nous. Je me suis assoupi, je crois. Je ne sais pas quels sont ces oiseaux que je ne verrai pas. Tout-à-l’ heure je me suis allongé, j’ai pris une posture de « savasana », au moins dans ma tête , seule ma main droite reposait paume ouverte vers le ciel, la gauche serrait celle d’Elle, ma veste faisait office de tapis et ma sacoche photo me servait d’oreiller. J’ai lâché prise. Je ne suis pas sûr d’avoir vraiment dormi. J’étais là et maintenant. Ouvert au présent. La respiration ralentie. Communiant avec le ressac. Et soudain ces trilles guillerets me ramènent à la conscience. Dans quelques minutes, nous nous lèverons. Croyant émerger d’un rêve, nous nous frotterons les yeux. Nous nous mettrons en marche, retrouvant le sentier bordé d’ajoncs en fleurs. Nous reconnaîtrons çà et là un arbrisseau immortalisé en pixels jaunes. Nous réintégrerons le flux du quotidien, avec son cortège de soucis. Et je ne me manquerai pas de me rappeler que le week-end a aussi apporté son lot de contrariétés, à commencer par la perte énigmatique de mon téléphone.