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le carnet vert
11 juin 2012

en nos premières vacances

Te souviens-tu de ces jours heureux ? Nous vivions nos premières vacances ensemble, il y de cela des siècles. Une parenthèse d’une petite semaine, ou peut-être bien deux, à nous tenir chaud emmitouflés dans les pampres échevelés du mistral. Je ne servais à rien, mais on m’avait déclaré bon pour le service, quelques mois plus tôt, et voilà que j’avais obtenu la permission de t’emmener en voyage pour quelques jours. Quand on m’avait parlé de service, j’avais entrevu la possibilité de peaufiner des engagements meurtriers au tennis de table, mais fi donc, il ne s’agissait pas de cela. Je rongeais donc mon frein en attendant la quille, et parfois je prenais la poudre d’escampette tout à fait réglementairement, comme cette fois-ci, où nous mangions sur la terrasse dominant des vergers qui s’étendaient jusqu’à une rivière, sur les rives de laquelle, disait-on, sévissaient les castors. Nous nous nourrissions essentiellement de ratatouilles mijotées avec les légumes locaux, tu m’apprenais à émincer, hacher, touiller, et finalement goûter. Pour nous mettre en appétit, nous confectionnions de larges tartines de pâté de grive ou de canard. Je me souviens qu’avec le premier, en boîte route, nous devions prendre garde de ne pas avaler les os de la bête, tandis que l’autre, en boîte or, laissait la part belle à un généreux morceau de foie presque gras. Pour faire nos emplettes, nous n’allions pas loin : nous descendions à travers les châtaigniers, par un sentier en escalier, jusqu’à la boutique du camping. Pendant ces repas royaux, nous écoutions les contes chantants d’Henri Gougaud, sur une radio périphérique, puis, après le temps d’une sieste, nous partions à l’assaut de routes sinueuses embaumant le genêt, qui nous amenaient invariablement au départ de drailles périlleuses. Le vent soufflait comme un fou. Les nuages roulaient bas. Tu portais un gros pull ; je ne sais pas si tu l’avais tricoté sur place, ou juste avant, tu aimais cela, tricoter les gros pulls. Tu avais décidé d’en réaliser un pour moi, et nous achetâmes de la grosse laine verte dans un village du coin. J’ai une photo quelque part sur laquelle tu dévales en riant une pente caillouteuse, au bas de laquelle je t’attends, tu portes ce pull en laine chinée, tes cheveux volent au vent. Je sens que ça sent tous les parfums de la montagne, rien qu’à voir cette image. Je t’attends en bas, je vais devoir écarter prestement mon appareil pour t’ouvrir les bras et te recevoir.

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Commentaires
P
Praline : penche-toi, penche-toi<br /> <br /> <br /> <br /> Calou : merci !
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C
très joli texte, tellement sensible!
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P
C'est beau !! et tellement bien décrit que je vois la scène. <br /> <br /> Quand j'aurai plus de temps, je me pencherai sur mes souvenirs des premières fois :)
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le carnet vert
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