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le carnet vert
21 juin 2011

conque d'or

J’ai eu un peu peur, l’autre jour. L’impression d’être revenu en enfance. Je devais être entre deux eaux. Assis dans le canapé bleu. Oui, assis, pas avachi. Enfin pas trop. Et oui entre deux eaux. Il n’est pas question de vin ni de bière ni de quelque substance euphorisante que ce soit dans cette histoire.

Ce n’est pas que ce soit désagréable, ni même inutile, d’exprimer parfois la part de l’enfant que nous avons en nous. Mais il ne s’agit pas de ça. Je flottais, disais-je, quelque part entre sommeil et éveil, et j’ai eu cette impression-là, de revenir en enfance.

 

Parce que j’entendais la mer.

Comme autrefois. Au bord du canal.

 

J’espère que ça ne gêne personne que je possède un canapé bleu, parce que c’est comme ça. Nous aimons nous y lover l’un contre l’autre. Elle et moi. Surtout l’hiver. Parce que la cheminée. Et la télé. L’été nous préférons nous attarder au jardin.

Il n’est pas bleu des mers du sud, le canapé. Mais bleu. Et j’y entendais la mer.

 

Le souffle de l’océan. Quelque part au bout de la pinède, derrière la dune.

Sauf que pas d’océan.

De la pluie qui tombe ? Je me suis même levé pour voir ce miracle par la fenêtre. Mais non, rien de tout ça.

La mer était dans ma tête. Rien d’étonnant à ça, cela dit. Nous revenions de voyage, et la descente de l’Airbus sur Orly m’avait passablement démantibulé les oreilles.

 

J’ai revu deux choses.

Autrefois, au bord du canal.

Et un timbre.

 

Le dimanche, c’était souvent le grand tralala dans la maison. Mon grand-père préparait des miracles en cuisine. Et ma grand-mère sortait la belle nappe du placard. Et la belle vaisselle. Je la suivais volontiers. Pas pour mettre le couvert, quoique je l’aurais aidée volontiers si elle l’avait demandé. Mais pour les coquillages. Deux gros coquillages comme je n’en ai jamais vu chez les poissonniers du marché.

Je n’étais pas grand. Disons que je mesurais environ un mètre, j’avais les yeux au ras du dessus du buffet. Là où les coquillages me faisaient de l’œil. Ma grand-mère s’en apercevait parfois, alors elle me tendait les conques. Écoute dedans, disait-elle, tu entendras la mer. Alors je plaquais les coquilles sur mes oreilles et de fait, j’entendais la mer. Le souffle de l’océan de ma tête, au-delà de la pinède. Tandis que de la fenêtre ouverte nous parvenait le clapotis du canal, et le ronflement du moulin. Voire, parfois, la corne d’une péniche.

 

J’avais beau être entre deux eaux, entre mer et canal, entre sommeil et éveil, entre jardin et canapé bleu, j’ai écrit conque sciemment. Tout se tient. C’est à cause du timbre.

Un timbre de ma collection, dont je n’ai pas cherché à feuilleter l’album. J’aurais pu, mais.

Un grand timbre vertical et coloré. Avec un coquillage dessus, du genre de ceux qui ornaient le buffet de ma grand-mère. Et c’était écrit Conca d’Oro. Une conque d’or, c’est beau, non ? Un nom à allumer des étoiles dans mes yeux d’enfant.

Mais non, je n’ai plus peur. Je suis bien réveillé, puisque j’écris.

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Commentaires
P
Annick : et la magie de l'enfance.
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A
La magie de ces coquillages qui nous offrent le murmure de la mer même quand nous sommes loin d'elle.
Répondre
le carnet vert
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