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le carnet vert
27 septembre 2010

le galet

Je n’oublierai pas ce jour.

Il faisait froid. Frais pour la saison, disons. Froid mais beau.

Alors nous avons marché sur la plage.

Nous n’avons pas compté nos pas. Je t’ai dit que j’aimais marcher sur la plage. Je t’ai dit que j’aimais le bruit des vagues. Tu as souri, sans doute, indulgente. Tu savais. Et tu aimais aussi.

Nous marchions sur l’estran. Le bruit nous envahissait. J’avais l’impression de faire partie intégrante du paysage, quelque chose comme ça.

La mer remontait.

Les petits courants venant des poches d’eau laissées par la précédente marée haute étaient neutralisés par la marée montante. Bientôt il n’y aurait plus rien. Que les vagues et le haut de la plage. Mais là, des réseaux compliqués d’eau claire de vaguelettes sableuses subsistaient encore. Il suffisait que nous gisions quelques temps au creux de la dune, disons une heure, et tout aurait changé.

Sauf le bruit.

Nous nous tenions en lisière de la frange écumeuse. Debout, enlacés. Nous nous embrassions. Bientôt nous avons remarqué que nos pieds s’enfonçaient dans le sol meuble. Alors nous avons marché encore.

Nous marchions sur le sable. Parfois sec. Parfois humide. La limite se faisait incertaine. Par endroits il nous fallait franchir des amoncellements de galets.

Ce n’est pas là que tu l’as choisi.

Tu as préféré un galet isolé.

Tu l’as ramassé.

Un beau galet rond et plat. Cinq à six centimètres de diamètre. Du calcaire ou autre chose ? Je n’en ai pas la moindre idée. Un beau galet en caillou véritable. De la veine de ceux qui vont bien pour les ricochets. Mais fait-on des ricochets dans la mer ? Bien sûr que non. Nous avons regardé un type s’y essayer, il y a peu. C’était peu probant. Non, les ricochets ça se pratique dans l’eau du Doubs. Pas dans la mer.

Tu m’as tendu le galet.

J’ai eu un mouvement d’incompréhension passager, je le confesse.

Tu m’as offert le galet.

Je l’ai compris.

Je l’ai tenu au creux de ma paume. Il y est devenu chaud.

Tu as dit que je pouvais en choisir un autre si je préférais.

Mais non.

C’était celui-ci.

Pas question de le changer.

Il a de la valeur.

Plus tard j’ai dit tu m’as fait un cadeau.

Inestimable.

Bien plus beau qu’une chemise neuve.

Tu as dit tu le prendras dans les moments de découragement.

J’étais ému pour ça.

Ce cadeau, le galet. Et tes paroles. Tout cet amour. Contre l’adversité.

Le galet est un peu lourd dans la poche de ma veste.

Mais il s’y trouve.

Il y a sa place. Et parfois, même en l’absence de découragement, je le prends en main.

P1110563

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Commentaires
N
Quel beau texte.<br /> J'aime beaucoup les balades sur l'estran. Mais personne ne m'a jamais donné de galet...<br /> Belle soirée, Phil.
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S
j'ai deux petites pierres dans ma poche...
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T
Une pierre d'amour ?<br /> ;-)
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F
Un galet à caresser, comme une petite madeleine minérale.
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P
Laurence : oui, fragile et fort, c'est le mot.<br /> <br /> Annick : un galet pour faire face à l'éloignement, c'est bien.<br /> <br /> Camille C : mon galet est poli mais sans transparence. Je le veux précieux.
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