la carte
A midi je sortirai.
Je me rendrai à la librairie. Peut-être aurai-je envie de feuilleter des livres. Dans une librairie, ça se fait. Ou peut-être pas.
J’aurai surtout envie de rêver. Je trouverai le rayon où sont présentés les cartes et les guides de voyages.
Si j’ai de la chance il y aura bien un ouvrage présentant les curiosités de la région où nous irons en vacances. Je m’y plongerai avec délectation. Plus tard. Au calme. Alors je cocherai les pages qui m’intéressent, et peut-être que je serai consterné en découvrant que ça n’intéresse que moi. Ça arrive parfois. Un guide, ce n’est pas le plus important.
C’est la carte Michelin, surtout. La jaune. Celle qui couvre deux départements. Je ne sais pas si je pourrai résister longtemps au plaisir de la déployer, de sentir le papier neuf encore raide craquer sous mes doigts. Je devrai faire attention de ne pas la froisser. Une carte ça se respecte. Je n’oserai donc pas l’ouvrir à la terrasse, tandis que mon café refroidira un peu. Il me faudra attendre d’être à l’abri du vent. Au bureau, vite fait. Pour avoir une idée. Puis ce soir. À la maison. J’étalerai la carte sur la grande table de bois massif et je découvrirai avec ravissement les petits traits jaunes ou blancs et sinueux. Mentalement je compterai les kilomètres nécessaires pour aller ici ou là et je me dirai que non, ce n’est pas possible, les routes sont tellement étroites et tortueuses, il faudra un temps fou. Les vacances ne sont pas faites que pour accomplir des trajets en auto, n’est-ce pas, il convient d’être raisonnable. Mais quand même. La carte. La route. Le plaisir.