Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
le carnet vert
15 juin 2010

la sieste

Je n’ai jamais aimé faire la sieste. Du moins, lorsque j’étais enfant je détestais cela. Et pourtant j’ai gardé des souvenirs heureux de mes siestes d’autrefois.

Je me souviens du vaste appartement qu’habitaient mes grands-parents, au premier étage d’un immeuble de pierre qui avait déjà connu plusieurs siècles. Nous dormions dans une grande chambre au plancher brut et aux murs nus. Cette pièce était éclairée par une large baie vitrée ouvrant sur un balcon flanquée d’une sorte de tourelle carrée, dans laquelle on avait aménagé une salle de bain. Pour qui connaît un peu les vieilles maisons de Franche-Comté, celle-ci était tout à fait typique. Dans le mur opposé à la fenêtre s’ouvrait ce qu’on appelait une alcôve, dans laquelle était disposé un lit d’une personne. J’avais le privilège de dormir dans l’alcôve.

A l’heure de la sieste, je ne dormais pas, bien sûr. Je m’efforçais de surmonter mon dépit de ne pouvoir momentanément jouer dehors ou dans le vestibule. Faire la sieste était du temps perdu, n’est-ce pas, que je tâchais de néanmoins mettre à profit. C’est du moins ce que je me dis après coup, tandis que je suis taraudé par de doux souvenirs, réveillés, c’est le cas de le dire, à l’occasion d’une conversation amicale.

J’aimais l’odeur particulière qui régnait dans la chambre. Je ne saurais trop la définir exactement. Je dirais, sans doute en enjolivant, qu’il s’agissait du parquet brut (et donc poussiéreux !) mélangé aux exhalaisons plus ou moins vaseuses venant du canal en contrebas, alors que la fenêtre était restée ouverte. On s’était en effet contenté de clore les persiennes, à travers lesquelles j’aimais voir jaillir les rayons obliques du soleil, qui dessinaient des faisceaux mouvants sur le sol.

Je me demande si à l’époque de mon enfance il y avait encore un peu de vie sur l’ancien port fluvial. Je ne saurais l’affirmer avec certitude. Ce qui est certain, par contre, c’est qu’il circulait encore un nombre conséquent de péniches sur le canal, et comme on se trouvait entre deux écluses, j’assistais à tout un rituel sonore, qui couvrait par moment le ronronnement continu du grand moulin, et  que j’aimais par-dessus-tout.

Je n’aimais pas faire la sieste, non. Mais j’aimais me trouver au plus près des sons du dehors. Des sons de la vie, en quelque sorte. De ce qui bâtit les souvenirs et nous fait tels que nous sommes.

Publicité
Publicité
Commentaires
O
Je constate en lisant les com' précédents que je ne fais pas exception à la règle. Je veux dire que ce texte réveille en moi de nombreux souvenirs de détestables siestes, en particulier dans des établissements de colonies de vacances. J'exécrais la sieste. La sieste obligatoire ! Pouah !<br /> <br /> Bravo pour ce texte (qui me donne envie d'écrire aussi quelques souvenirs de siestes ;-)
Répondre
P
Nathalie : marrant comme on se croise, hein.<br /> <br /> Tifenn : j'aime bien faire réveiller les souvenirs<br /> ;-)<br /> <br /> Bleck : j'imagine... <br /> <br /> Mlle Bille : bienvenue, et c'est moi qui te remercie.
Répondre
M
je me suis surprise au souvenir des antiques siestes chez mes grand-parents, près d'un vieux poêle, dans le montagnes. Rien qu'en lisant ce texte, je me suis offert un beau voyage en amnésie. Ils sont rares, ces textes là. merci bien.
Répondre
M
je me suis surprise au souvenir des antiques siestes chez mes grand-parents, près d'un vieux poêle, dans le montagnes. Rien qu'en lisant ce texte, je me suis offert un beau voyage en amnésie. Ils sont rares, ces textes là. merci bien.
Répondre
B
Incapable de me souvenir si j' ai fait des siestes dans mon enfance, aucun souvenir !<br /> <br /> Celle de dimanche dernier, je m'en rappelle parfaitement.<br /> <br /> Bleck
Répondre
le carnet vert
Publicité
Archives
Newsletter
14 abonnés
Visiteurs
Depuis la création 145 945
Publicité