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le carnet vert
1 mars 2010

la grande guerre

C’est la deuxième fois que je viens à Péronne.

Nous venons là.

Nous sommes cinq. Mon épouse et moi. Un couple d’amis et leur fille.

Je ne dirai néanmoins pas nous, mais je. Il est des circonstances où on est seul, forcément.

On est seul face à son émotion.

Je me refuse à mettre des G majuscules à grande guerre.

Ce n’est pas de l’irrespect envers ceux qui sont morts.

Mais une guerre ne peut pas être grande.

Je me souviens de l’émotion de la première fois.

Je me souviens des gravures d’Otto Dix.

La guerre vue de l’intérieur.

Les tranchées, les trous d’obus. La mort. La terreur. Le désespoir.

Je me souviens du « trou d’obus avec fleurs », la seule de ses images ne montrant pas d’homme halluciné. Seulement les fleurs au bord du trou.

Cette image là, en contrepoint des autres, mais dans son genre tout aussi violente, m’avait tiré des larmes, je crois.

Ensuite nous avions visité le musée.

Puis j’étais sorti dans la cour.

Il pleuvait, c’était l’été. J’avais photographié le béton du musée dans la pluie.

J’avais parlé quelques minutes avec un bonhomme qui promenait son chien dans les fossés du château. Les picards sont volontiers volubiles.

Il pleuvait ou il pleurait.

Je mélange.

Comment peut-on être ému à ce point par des évènements vieux de près d’un siècle. Pourtant c’est ce qui m’arrive.

Je n’ai pas souvenir qu’on m’ait dit un jour qu’un ancêtre soit resté dans les tranchées. Il n’y a là rien de personnel. Ce n’est que mon émotion.

Les fleurs au bord du trou d’obus, c’était ce qu’on appelle se prendre une baffe en pleine gueule. Véridique.

Je n’aime pas trop la noirceur. Je ne déteste pourtant pas les travaux d’Otto Dix. Tout n’est pas noir dans ce qu’il a peint.

Cette fois-ci, il pleut encore (il pleure encore) et il fait froid. C’est l’hiver.

Nous ne visitons pas le musée.

Nous venons pour l’exposition. Ce sont des bandes dessinées. La guerre, aussi peu grande soit-elle, mise en bandes dessinées.

Une première partie consacrée aux travaux de lycéens, collégiens et écoliers de la région.

Je regarde ça.

Je m’attends à un nouveau coup au plexus. L’émotion est présente, en dépit de la naïveté.

Des larmes me viennent encore.

Je n’y vois aucune sensiblerie.

Comment ne pas être ému ?

Nous décidons d’aller voir sur le terrain. Les tranchées et les trous d’obus. Il n’y aura pas de fleurs, c’est l’hiver. De la neige sur les talus.

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Commentaires
G
J'avais 14 ans quand j'ai visité Oradour-sur-Glane.<br /> Je crois que c'était trop jeune, en tout cas ça m'avait secouée comme il faut, j'en ai cauchemardé un bon moment. Aujourd'hui, j'en garde toujours la même nausée.<br /> Un temps, je voulais aller voir les camps, le plus célèbre et les autres. Jusque là je ne l'ai pas fait, mais peut-être un jour en aurais-je le courage, la volonté, l'envie même peut-être...<br /> <br /> Je reste par ailleurs dans un état de stupeur assez vague quand je me rappelle qu'il y a eu des génocides partout dans le monde, et qu'il y en a encore actuellement.<br /> Et ça doit pas être folichon à voir, dans certaines régions du monde.<br /> Forcément, on ne le perçoit pas comme on peut le percevoir quand on est sur des lieux de crime. Il n'y a pas grande émotion à travers les lointains échos qu'on peut entendre ou voir.<br /> Ce ne sont qu'eux, très loin, qu'on torture, qui meurent... Bref.<br /> <br /> Très belle manière, en tout cas, de retranscrire ton voyage, surtout celui qui s'est passé à l'intérieur.<br /> <br /> Il n'y a pas, il n'y aura jamais de grande guerre, on est bien d'accord.
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C
100 ans c'est vrai et si proche dans les mémoires...
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P
Naline : oui, on se demande à quoi ça sert, c'est désolant.<br /> <br /> Aline : "mon sang se glaçait". Tu as tout dit. Mais je crois qu'on ne doit rien oublier et que la visite est nécessaire. J'ai vu Oradour sur Glane, ce n'est pas loin de chez moi. C'est le pire du pire. Mais on ne doit pas oublier.
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P
Plusieurs fois je suis passée devant le Struthof et n'ai jamais voulu et pu aller le visiter. Rien que de passer devant, mon sang se glaçait, le peu de choses que j'ai vues de l'extérieur m'ont choquée. Je veux croire aussi qu'on ne reverra jamais ces horreurs...
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N
J'ai été émue aux larmes aussi en visitant les mémorials de la grande guerre dans la Somme. Et le malheur, c'est que l'humanité n'en a pas tiré les leçons... Pauvre de nous !
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